27 sept. 2007

"Spoon-fed"

"Spoon-fed" (littéralement "nourri à la cuillière") telle est l'expression qui correspond le mieux aux étudiants d'UWO et de King's, ainsi qu'à la manière qu'ont les professeurs de les considérer. Pardon, je devrais dire: materner. Le mot d'ordre des professeurs est de ne pas choquer l'étudiant, de ne pas aller contre lui, de respecter son "individualité" (mais évidemment que dans ses aspects positifs: s'il fait une erreur par exemple pas question de personnaliser la correction). La séance de formation d'aujourd'hui, appelée "comment corriger un étudiant", fut édifiante. On nous a par exemple très sérieusement expliqué, après avoir fait mu-muse avec trois feutres pendant 10 minutes, que l'utilisation de la couleur rouge pour la correction est prohibée (trop "agressive") et que la correction systématique des fautes d'une copie est impensable (trop "décourageant"). Il faut voir les stratégies et les trésors d'ingénuosité mis en place dans le souci d'effectuer une correction efficace non traumatisante pour ces pauvres étudiants qui, rappellont-le, ont payé la bagatelle de 6 000 $ de droits universitaires. A ce prix-là, après tout, autant être choyé. Service après-vente compris.

Il en va de même, comme l'ont souligné nos camarades lecteurs, pour la notation. On nous a distribué un document intitulé "barème et critère de notation", qui expose, pour chaque note (de A à F) les qualités, ou les défauts, qui font que l'on mérite telle ou telle note. Petite question: à votre avis combien, selon ce document, vaut une rédaction qui possède les "qualités" et les défauts suivants?

-"les erreurs de grammaire, de lexique, d'orthographe et de style gênent parfois la compréhension du texte".

-"De nombreuses erreurs portant sur des formes étudiées en classe, ou ne correspondant pas aux attentes pour ce niveau de langue".

- "le traitement du sujet est trop général ou superficiel (généralisations excessives, clichés, etc...)".

-"faiblesse de l'argumentation due à un manque de preuves...".

-"erreurs dans l'articulation logique des idées (exemple: confusion entre la cause et la conséquence), ce qui gêne la compréhension".

-"trop de citations, ou citations mal intégrées au texte. Passage du texte A LA LIMITE DU PLAGIAT accidentel ou non délibéré".

Alors combien un tel travail peut-il valoir? En dessous de la moyenne? Peut-être JUSTE en-dessous de la moyenne, en étant généreux?

Verdict: entre 12 et 14 sur 20, soit un C dans le système universitaire canadien et la mention "travail acceptable" (toujours selon le barême d'évaluation). Pas étonnant alors que beaucoup d'étudiants arrivant en 1e année de français et ne sachant pas conjuguer un verbe du 1e groupe au présent de l'indicatif parviennent à obtenir leur diplôme haut la main...

Voilà pour le coup de gueule de la journée.

25 sept. 2007

Western Fair

Il y a 15 jours, nous avons passé une journée à Western Fair, immense parc d'attractions où à côté des manèges traditionnels nous avons pu assister à des shows aussi kitsh les uns que les autres. Il faut savoir que Western Fair, à l'origine une foire agricole de l'Ontario, est un des événement de l'année à London, et que par conséquent c'est le lieu de rendez-vous de nombreux Londoniens (dont une partie assez importante de nos étudiants).


La piscine de Docks dogs: concours de chiens sauteurs dont la victoire revient à celui qui bondit le plus loin.

Le grand gagnant de la journée.

Un petit tour en Monster truck?

Steph en pleine partie de lancer de boules de bowling. Apple peeling contest: concours d'épluchage de pommes. Le but du jeu est d'obtenir la plus longue épluchure de pomme! No comment...

La piste des racings ducks and pigs, courses de canards et de cochons. Les canards en pleine course... No comment bis.Le montreur de serpents de Snakes of the world.

Le Human Cannonball: un malade mental se projete lui-même à 25 mètres de hauteur depuis son canon...

...pour atterrir dans ce filet.

Et le meilleur pour la fin: le Demolition Derby, un combat de voitures avec sous le capot un moteur V8, des portes soudées et des vitres démontées. Le but? Etre le dernier "pilote" dans une voiture encore capable d'avancer, après avoir détruit le maximum de voitures concurrentes. Ici les voitures au départ.

Notre avis sur Western Fair? Des spectacles un peu potaches, des jeux marrants, mais rien de transcendant. Si les Canadiens ont eu l'air d'apprécier, voire carrément adorer (notamment le Demolition Derby), ce fut pour nous une journée bien sympa qui a eu au moins le mérite de nous faire sortir de notre basement!

Cet article, qui n'engage que ceux qui l'ont écrit, est évidemment à considérer au second degré...

19 sept. 2007

Première semaine de cours pour Morgan

Tout comme Stéphanie cette semaine fut pour moi celle du baptême du feu. Les étudiants apprécieront-ils mes cours, ou bien me dénonçeront-ils aux instances supérieures du King's College pour manquement à mes devoirs de Teaching assistant? Suspens, suspens.

Mais avant, petite visite guidée de mon lieu de travail:















Au centre du King's College, le bâtiment le plus récent où se trouve mon laboratoire.
















Le laboratoire de langue où je donne tous mes cours de la semaine. Chaque étudiant dispose d'un ordinateur, relié au mien (l'écran noir devant le tableau). C'est grâce à cette connexion entre mon ordi et ceux des étudiants que je peux leur envoyer films et pistes audio, et que je peux les empêcher de checker leurs mails et de chater sur MSN (pardon pour les anglicismes, ce doit être l'influence québecoise). Il y aussi un lecteur dvd et un projecteur.


















Mon bureau avec (grand luxe) un téléphone permettant de passer des appels longue distance... gratuit et à volonté!
Bon je vois que vous commençez à vous impatienter: comment s'est passée la première semaine de cours? Plutôt bien, d'après les réactions des étudiants. Bon d'accord j'ai eu quelques perles, à l'instar des autres lecteurs, comme la réponse à "pourquoi as-tu choisi d'étudier le français?", "parce que la France est le pays de l'amour, et je veux être amoureux". Sans commentaire... Mes étudiants sont de niveau très différents, de ceux qui n'ont jamais parlé français à des 3e années capables de mener une discussion. Avec mes étudiants de 1e année nous avons travaillé sur la vie universitaire en France, où je les ai volontairement choqué en leur disant que chez nous la fac est -presque- gratuite. Mais ils n'en revenaient pas de savoir qu'en France, une seule matière possible à l'université. Tu entres en histoire, tu finiras en histoire. Il est vrai qu'ici les étudiants passent d'une heure de psychologie à un labo de français, pour finir par de la sociologie et des "études des femmes" (women studies, je n'ai pas encore réussi à savoir ce qui se cachait derrière un intitulé aussi intéressant). J'ai terminé la séance en leur passant une vidéo des manifestations étudiantes anti-cpe (héhé, un peu de propagande ne fait jamais de mal). Pour les 2e et 3e années, le labo tournait autour de la mendicité publique, avec visionnage de courts-métrages traitant du sujet, toujours dans le but de les faire parler (ce qui n'est pas une mince affaire, croyez-moi).
La suite très bientôt...

Première semaine de cours pour Stéphanie

On est mercredi et j'ai fini ma semaine...Je n'ai cours que du lundi au mercredi, emploi du temps plutôt sympa.
Ma première semaine de cours s'est plutot bien passée, j'ai suivi toutes les instructions (enfin presque) au sujet des choses à dire et à ne pas dire. Il faut savoir qu'ici l'étudiant paie trés cher son année alors il faut le materner un maximum et surtout ne pas froisser sa sensibilité car il peut se sentir discriminé ou humilié. Il faut par exemple éviter de corriger individuellement un élève en classe car cela peut être perçu comme une humiliation et celui-ci peut aller se plaindre chez le doyen, il est donc recommandé de faire des corrections collectives en ne visant personne...
J'ai tout d'abord eu cours avec des premières années qui ont un assez bon niveau dans l'ensemble. Ce qui est marrant c'est que dans les cours il y a plein d'étudiants de sections différentes et j'ai pu constater que ceux qui font partie de la prestigieuse (ce sont eux qui le disent) Ivey business school, école de management qui forme les futurs chefs d'entreprise, sont les plus dynamiques et les plus interessés par la culture française. J'ai eu par exemple un étudiant trés branché politique qui m'a demandée ce que je pensais de Sarkozy, enfin il m'a plutôt dit " t'as vu il est super cool sarkozy". Et lorsque je lui ai demandé ce qu'il pensait de la politique française il m'a répondu que nous les Français étions des anarchistes qui n'aimions pas l'ordre. Quelle belle image de notre pays!
J'ai un autre cours de débutants dans lequel la plupart des élèves ne parlent pas un mot de français, à part le "voulez vous coucher avec moi" auquel j'ai eu droit lorsque je leur ai demandé quels mots ils connaissaient en français.
Enfin, aujourd'hui j'ai cru manquer l'incident diplomatique dans une classe où certains des étudiants ont mon âge alors que d'autres sont beaucoup plus agés (certains ont la cinquantaine). Quand je leur ai expliqué la différence entre le tu et le vous, je leur ai dit qu'ils pouvaient me dire tu étant donné que j'ai soit le même âge soit je suis plus jeune qu'eux et donc cela me ferait bizarre qu'ils me disent vous. Aie. Qu'ai-je dis???? J'ai tout à coup eu droit à un grand moment de silence dans la classe, les anciens se sont regardés avec un air interrogateur et choqué du style "elle nous a dit qu'on etait vieux!!!!"Je me vois déjà convoquée par la police ontarienne et accusée de discrimination sur l'âge pendant que mes compatriotes lecteurs, Morgan et Mo, tentent désespérément de collecter des fonds pour me faire sortir de prison. Enfin, tout ça pour dire que le politiquement correct est omniprésent au Canada. Ils sont bien gentils et serviables les canadiens mais cela à un prix visiblement...

9 sept. 2007

Quinze premiers jours

Après avoir passé quinze jours à s'installer et à faire connaissance avec l'université, les profs, les étudiants et la ville en elle-même, et maintenant que l'on a internet à domicile (sans avoir à pirater le wifi de la proprio), voici un résumé de nos deux première semaines.


L'arrivée et les premiers jours à London


Après un voyage assez chaotique et riche en rebondissements (bloqués aux services d'immigration de l'aéroport de Toronto alors que l'heure tourne et que notre avion vers London est sur le tarmac, prêt à partir) nous sommes finalement arrivés à London où nous avons pu immédiatement expérimenter la légendaire hospitalité canadienne. Audrey, doctorante à UWO (University of Western Ontario) nous attendait à l'aéroport avec un panneau "bienvenue au Canada Stephanie et Morgan", nous a hebergé chez elle, nous a fait faire une visite guidée de la ville, nous a amené faire les courses, etc, etc. Les premiers jours se résument à la recherche d'un appartement, à une masse de papiers à remplir et de présentations dans les bureaux du gouvernement fédéral, où les employés bilingues nous encouragent à traiter avec eux en français, pour permettre aux canadiens francophones non-québecois d'acceder à des promotions...


"Home sweet home"

Assez rapidement nous avons trouvé un appartement, relativement près du centre ville ("relativement" car ici streets, avenues et autres roads sont longues de plusieurs kilomètres) et entièrement meublé et équipé. C'est un basement, c'est-à-dire le sous-sol d'une maison avec entrée privée à l'arrière (c'est apparement assez courant de louer son sous-sol ici).







La cuisine. Observez la taille du frigo... et dire que la proprio hésitait à nous le louer, pensant qu'on y serait à l'étroit! Le fait que l'on se soit présenté comme "teaching assistant" avec un salaire tombant tous les 30 du mois l'a immédiatement rendu moins scrupuleuse à l'égard de notre besoin d'espace...





Le salon, avec télé (cablée) et lecteur dvd. On a même hérité de la plante verte (et des albums photos des proprios dans le meuble).


La chambre.













Le jardin derrière la maison, peuplé d'écureuils et de guêpes, dont nous essayons de profiter un maximum avant l'arrivée du (grand) froid.











Une trouvaille faîte lors d'un yard sale, sorte de vide-grenier du samedi que chaque Canadien est libre d'organiser sur son jardin donnant sur la rue: un vélo à 8$ (environ 6 euros). Et il roule! Oui oui! Ici les trajets à pieds sont à oublier. On a essayé au début, puis on a rapidement opté pour d'autres solutions (bus, vélo) tant les distances sont importantes. Notre maison porte le numéro 582, et on a vu des numéros 1200...






Le campus


University college, la faculté des lettres du campus, où Steph donne ses cours. La tour est le symbole d'UWO.











Des frosh, étudiants de 1ere année de différentes disciplines, se réunissent sur la pelouse du campus et forment un W, initiale de Western. Chaque discipline impose son déguisement pour l'occasion. C'est à la section qui crie et chante le plus fort son hymne personnel à la gloire d'UWO ("Western! Western!"). Cela fait partie de l'initiation des 1eres années.






Le centre commercial du campus. On y trouve de tout, une banque, une pharmacie, un cinéma, une librairie, une agence de voyages, un complexe sportif et surtout... pas de resto universitaire, mais de nombreux fast-foods!









La Weldon Library, bibliothèque universitaire malgré son allure de banque. Ouverte tous les jours jusqu'à 23h30, elle pousse jusqu'à 2h du matin en période d'examens! L'assiduité des étudiants reste à vérifier car pour l'instant, malgré les frais d'inscription élevés (8000 dollars par an) ils ont l'air plus enclins à faire la fête!






Une des nombreuses cités U du campus.

Sur le pont au-dessus de la rivière Thames, bloqué à cause des travaux. D'après les Canadiens il y a deux saisons: winter et construction. Ils en ont de la chance, chez eux les travaux ne durent que 6 mois de l'année.













Le bâtiment administratif de King's college, établissement universitaire catholique affilié à UWO. C'est à King's que Morgan donne ses cours. Il est plus modeste par sa taille qu'UWO.


Boiserie vernissée pour le main hall du bâtiment administratif de King's.










A l'extérieur du campus, The Ceeps est le QG des étudiants les soirs de week end (et de semaine aussi d'ailleurs). "Welcome back students", telle est la devise de ce lieu de perdition!


Une soirée entre Français au Ceeps, avec Marie, étudiante en astrophysique rencontrée par hasard dans le bus, et Mo, autre teaching assistant niçois. Sans oublier le personnage principal, le pichet de bière blue light.